Enzo D’ARMENIO | IMACTIS — Fostering Critical Identities Through Social Media Archival Images


Lauréat d’une bourse MSCA IF, Enzo D'Armenio effectue ses recherches  au sein de l'Unité de recherches TRAVERSES de l'ULiège.

Enzo D'Armenio

Mon projet porte sur l’analyse des images identitaires sur les réseaux sociaux, avec l’objectif principale de construire un répertoire de stratégies rhétoriques pour une utilisation plus consciente et critique des images de la part des citoyens européens.

À la base du projet, il y a l’idée qu’il faut gérer deux tendances opposées caractérisant les interactions sociales sur les réseaux numériques. D’un côté, une sorte de régression expérientielle de la communication due à : a) la large diffusion d’images afférentes à l’expérience vécue, telles que les « selfies », les prises de vue en subjective et les nouvelles formes de directe vidéo ; b) de modalités instinctives d’interactions telles que les actes de « likes », de partage et de « follow ». 


De l’autre côté, l’autre tendance est la gestion algorithmique des identités, c’est-à-dire la manière dont les logiciels construisent des profils identitaires à partir des comportement des usagers, afin de : nous mettre en relation avec des personnes ayant des identités sociales et politiques similaires (Facebook) ; proposer des produits ou des services susceptibles de nous intéresser (AdSense et Amazon) ; gérer les œuvres de divertissement en cohérence avec nos habitudes et nos goûts (Netflix) ; et présélectionner des partenaires amoureux potentiels (Grindr et Tinder).

Mon hypothèse est qu’entre ces deux médiations expérientielle et algorithmique il y a la nécessité de construire une connexion narrative afin d’obtenir une véritable identité : un geste réflexif d’appropriation par rapport à ses propres archives d’images, afin d’exploiter, plutôt que subir, les contraintes expérientielles et algorithmiques des réseaux numériques. Le modèle utilisé est celui de l’identité narrative de Paul Ricœur (Soi-même comme un autre), selon lequel entre identité-idem comme permanence des caractères « involontaires », et identité-ipse comme maintien de soi dans le temps, il faut prévoir une médiation narrative. En utilisant les répertoires imaginatifs de la littérature, la construction de l’identité se baserait sur une appropriation narrative de ces modèles afin de gérer les contingences de la vie et leur donner une forme identitaire durable. 


Selon ma relecture, les images expérientielles (selfies, subjectives, live video) peuvent être positionnées du côté de l’identité-idem liée au caractère chez Ricœur, tandis que la gestion algorithmique tente d’assumer un modèle comportemental de l’identité lié à l’identité-ipse. Afin de construire une identité personnelle entre ces deux pôles, il faudrait construire une narration réflexive, mais le répertoire imaginatif pour construire ces appropriations ne peut pas être celui de la littérature, parce que la réflexivité de l’appropriation doit concerner des idées visuelles. Le répertoire le plus adapté serait celui du cinéma, et plus précisément des found footage vidéos : films qui exploitent des images d’archives afin de construire un nouveau discours en manipulant les identités qu’y sont contenues. Mon hypothèse est que les usagers des réseaux sociaux peuvent s’approprier leurs propres archives en se basant sur les modèles fictionnels et documentaires des found footage vidéos.

Au niveau pratique, les trois phases principales de la recherche seront : 1. la construction d’une épistémologie des documents visuels, articulées en trois dimensions (médiatique, sémiotique et rhétorique), 2. l’analyse qualitative des corpus de found footage vidéos avec les outils de la sémiotique et de la rhétorique visuelle, et 3. l’extraction de stratégies d’appropriation adaptées aux images sur les réseaux sociaux. Cette dernière phase exploitera une approche quali-quantitative, afin d’explorer de large corpus d’images avec des outils informatiques liés aux approches du « deep learning » et de la « feature extraction ».

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